Petite histoire du prince-de-galles

Superbe prince-de-galles qui continue années après années d’enthousiasmer les élégants et d’animer la surface de leurs costumes. Ce motif sied aussi bien aux costumes qu’aux vestes seules, gage de durabilité et de longévité vis-à-vis des rayures par exemple, toujours un peu curieuses sur une veste seule il faut le reconnaitre. Le prince-de-galles sait par ailleurs se faire discret, passant avec certains caviars et chevrons dans la catégorie des faux-unis. On ne le voit que de près, et au loin, le costume parait uni. Ce qui plait encore plus. Mais d’où vient ce motif ?

Il fut popularisé dans les années 1920, il y a un siècle donc, par le Prince de Galles d’alors, David d’un de ses prénoms, fils de George V. C’est lui qui abdiqua rapidement pour suivre son grand amour, l’américaine Wallis Simpson. C’est aussi lui qui avait quelques sympathies nazies. Bref, quoiqu’il en soit, dans ses jeunes années, ce fringant jeune homme toujours à la pointe du style aimait faire de l’effet par ses vêtements. Certains diront qu’il avait un goût très sûr, d’autres qu’il savait être grotesque. Quoiqu’il en soit, il mit ce tissu écossais sur le devant de la scène, et en particulier aux États-Unis d’Amérique, ce motif fit florès. Ci-dessous, le Prince de Galles porte costume et casquette en prince-de-galles. J’imagine que l’attrait venait de l’aspect ambivalent de l’étoffe, faite pour la campagne écossaise, et portée à la ville. Une sorte de dissidence vestimentaire comme d’autres font aujourd’hui. Mais il l’avait bien trouvé quelque part ce tissu ?


Précisément en Écosse. Patrie des tartans, ces grands carreaux colorés, le prince-de-galles en est un lointain dérivé. Ces tartans au XIXème siècle se figent dans leurs dessins. Chaque famille, chaque clan, chaque région adoptent le leurs. Mais pour ceux qui n’en n’ont pas, comme les riches industriels ou les aristocrates anglais en villégiature écossaise, il faut bien créer des tissus reconnaissables. C’est ainsi qu’apparurent les « shepherd’s check » et autres « gun tweed » reconnaissables à leurs lignes colorées s’entrecroisant plus ou moins en pieds-de-poule. Ci-dessous, un tweed façon « shepherd’s check » de chez Moon :


Ce serait précisément une de ces histoires qui serait à l’origine de tissu, pour habiller des gardes-chasse attachés au château d’Urquhart en Ecosse au bord du Loch Ness. On prononce « Eurqeut ». Mais au lieu de se contenter des dessins habituels en lignes colorés proposés plus haut, il eut l’idée de prendre un bête pied-de-poule noir et blanc, et d’en écraser les proportions alternativement. Ce faisant, cela crée des blocs de pieds-de-poule, reliés les uns aux autres par des harpes. Une sorte de carroyage irisé apparait. Quelle idée ! Ainsi naquit le « glen urquhart check » ou « glen urquhart plaid ». Vous reconnaitrez ci-dessous très clairement les croisures en pied-de-poules :

Historiquement, le prince-de-galles est donc très monochrome et plutôt fort dans son dessin. Ralph Lauren adore présenter de telles vestes. Si elles m’ont toujours séduites, je les trouve néanmoins assez fortes et tapageuses. Mais c’est beau. Très vite, des lignes bleue-vertes plus fortes apparaissent et encadrent les harpes, donnant plus de relief avec la superposition d’un double carreau-fenêtre. C’est ce tissu que choisit un autre Prince de Galles, grand père de ce lui évoqué. Là nous parlons du fils de Victoria, le futur Edouard VII. Il aimait l’Écosse et la vie au grand air. Il fit sien ce motif de lainage. Ci-dessous, un exemple contemporain de ce que devait-être ce premier prince-de-galles à sur-carreaux doubles :

Il y eut encore quelques perfectionnements, avant d’arriver aux prince-de-galles que nous connaissons aujourd’hui et dont nous parlerons peut-être prochainement ?

Belle et bonne semaine, Julien Scavini

5 réflexions sur “Petite histoire du prince-de-galles

  1. Rodolphe Dulait 7 décembre 2020 / 23:28

    Bonsoir Monsieur,

    Merci pour vos articles toujours aussi intéressants et diversifiés ! À l’occasion, pourriez-vous nous faire un commentaire de quelques tenues de la série The Crown sur Netflix ? Je suis certain qu’il y a beaucoup de choses à dire.

    Merci beaucoup pour ce que vous faites.

    Bien à vous,

    Rodolphe Dulait rodolphe@dulait.eu +32479351372 ________________________________

    • Julien Scavini 16 décembre 2020 / 04:18

      Bonjour,

      j’ai pris beaucoup de plaisir à regarder les premières saisons. Ensuite, lorsqu’ils ont décidé de tordre le cou au Prince Charles, j’ai décidé d’arrêter… Mais il est vrai que visuellement, c’est une splendeur! Voitures et intérieurs somptueux. Pour les costumes masculins, je n’ai jamais été retourné, même si c’est très très beau et sobre à la fois.

  2. Odile Boqué 8 décembre 2020 / 06:26

    Bonjour et merci pour vos articles, c’est passionnant et j’apprends beaucoup.

    • Julien Scavini 16 décembre 2020 / 04:18

      Merci à vous !

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