Vestes dépareillées pour l’été

Si le répertoire des tweeds est très développé l’hiver, la saison estivale a elle aussi ses classiques, sport coats ou blazer. Mais leurs choix semblent souvent plus compliqués, peut-être est-ce dû au soleil et à sa lumière, qui normalement nous écrase… Nous préférons alors la clarté. Car si les motifs ne nous font pas peur d’habitude, nous avons tout de même quelques scrupules maintenant. Voici ce soir trois propositions toutes simples, classiques, presque des essentiels de la garde robe pour l’été. Les coloris sont volontairement unis, et cela pour faciliter les associations avec cravates et chemises. C’est la garantie de la longévité aussi, loin des caprices de la mode.

Vous pourriez donc avoir dans votre penderie, dans l’ordre, un blazer, une simili-saharienne, une veste couleur ‘ficelle’:Trois propositions simplismes donc. Le blazer tout d’abord, croisé ou droit (plus facile à porter), est bleu mais peut varier dans cette tonalité, comme ici dans une proposition de Brooks Brothers. Historiquement et au bord de la mer, on faisait confectionner des pantalons dans les anciennes voiles de pêcheurs, souvent de couleur vieux rose. Avec, espadrilles de toile et une chemise à rayures bleues, vous complétez l’ensemble simplement.

La saharienne – qui d’ailleurs n’en est pas vraiment une – avec ses nombreuses poches plaquées à rabats est très utile pour partir en vadrouille ou prendre l’avion. Vous pourrez fourrer à l’intérieur de celle-ci tous vos accessoires, téléphones, clefs, cartes, portefeuille etc. qui seront en sécurité et ne risqueront pas de tomber si vous défaites le veston. En blanc, elle se complète aisément d’un chino sable ou khaki, ou bien bleu. C’est une pièce en coton polyvalente!

Enfin, la petite veste toujours utile, celle à poches plaquées en laine moyenne de couleur ficelle. C’est l’accompagnatrice idéale du jeans. Comme elle reste unie, elle peut être complétée à l’envie et suivant le moment : carreaux, rayures, couleurs diverses, petits motifs etc.

Notons que ces propositions peuvent varier énormément, en restant sur la même base classique, grâce à une multitudes d’accessoires et souliers. Et vous, quel veston utilisez souvent? Avez-vous d’autres idées?

Julien Scavini

Blazer de régate

Lors des célèbres régates de Henley, dans l’Oxfordshire, il est traditionnel de sortir une autre pièce vestimentaire oubliée de son placard : le boating blazer quelques fois appelé rowing jacket, ou blazer de régate. Intéressons-nous aujourd’hui à cette curieuse veste dépareillée et bariolée, très estivale.

Traditionnellement, chaque club sportif possédant ses couleurs, il les décline sous toutes formes, de la cravates regimental à la veste en passant par les boutons de manchettes et les rubans de canotiers. Il s’agit en quelque sorte de l’ancêtre des maillots d’équipes qui peuvent valoir si chers à l’heure actuelle. Chaque club, pour se reconnaitre, éditait donc un tissu pour couper… des blazers. Ceux-ci étaient parfois même rehaussés d’armoiries à la poitrine. D’ici provient l’une des origines du blazer bleu ; bleu car sans appartenance particulière… Le boating blazer donc, se présente principalement sous la forme d’une veste droite à trois boutons, sans fente et à poches plaquées. Il est confectionné soit un tissu à bandes verticales (et il existe dans ce répertoire de nombreuses variantes très très très (trop) colorées), soit dans un drap uni (rouge, jaune, vert etc) dont les bords sont sous-tachés (gansés) d’une autre couleur (principalement le blanc). L’effet est immédiat, you’re a sport !

Difficile de nos jours de trouver une veste de régate, plus difficile encore de l’associer dans une tenue, sauf pour les harmonies de coloris les plus minimalistes. Ces articles peuvent être dénichés occasionnellement, au détour de collections comme chez Hackett ou Ralph Lauren. Sinon des spécialistes existent, comme Walters à Oxford ou New & Lingwood à Londres, ou encore Jack Wills. Autrement, ils peuvent être confectionnés sur mesure, faut-il encore pouvoir trouver le tissu. Enfin, ils sont admirablement complétés par le canotier (straw boater, que l’on peut acheter sur le site de Darcy Cloth) ou la casquette regimental (rowing caps).

Julien Scavini

L’homme le plus élégant du monde est …

Pour Stiff Collar, l’homme, que dis-je l’être supérieur, le plus élégant du monde est Sa Majesté l’empereur du Japon, plus connu sous un nom qui ne se prononce pas, Akihito. Fils d’Hirohito, il accéda au trône en 1989 et ouvrit alors l’ère Heisei du calendrier administratif nippon.

Récemment, je regardais la chaîne d’information continue NHK World lorsque j’aperçus la cérémonie de remise des lettres de créance des ambassadeurs à l’Empereur et fus saisi par l’implacable netteté des habits au palais de Tokyo. La jaquette, ou morning coat, y est portée mieux que partout ailleurs, à la fois par le personnel et par sa majesté – normal me direz-vous -. Il m’a même semblé que l’esthétique et la rigueur dépassaient de loin celles du palais de Buckingham.

Si les membres de familles royales sont souvent habillés pour le mieux, je trouve que rien ne surpasse en maitrise et en classicisme les mises de l’héritier du Trône du Chrysanthème. Car il n’a pas un physique facile, étant petit, fort et – surtout avec le temps –  légèrement voûté. Il possède également un cou très court. Bref, une physionomie pas évidente à habiller. Et pourtant, et pourtant, quelle prestance! Ses tailleurs ont réussi la gageure de la lui procurer. Même si la précision et le maintien japonnais aident beaucoup.Ces trois tenues que j’ai dessiné ce soir représentent un peu la quintessence de son répertoire. Il pourrait être aisé de rapprocher celui-ci de la garde robe d’un autre royal gentleman, le duc de Windsor, frère ainé abdicateur de George VI. Ils ont un peu les mêmes physiques courts et se ressemblent en jaquette. Mais au japon, point de motifs bariolés, point de vestes sport.

Trois tenues donc. A la ville, il me semble qu’il porte systématique le costume veste croisé sur pantalon large et droit. Ses vestons sont coupés sur deux boutons fonctionnels. Ce qui passerait pour un vieux croisé des années 80 prend ici tout son sens et augmentant le V des revers. Additionné à une veste courte, cela fait oublier sa taille. Et il ne se sert pas, malgré son rang ô combien important, de talonnettes comme M. Sarkozy.

Le costume d’apparat est aussi issu d’une tradition britannique. Il est d’ailleurs marquant de voir à quel point les codes anglais ont été intégrés à la culture japonaise, et pas de travers en plus! Costume donc constitué d’une queue de pie portant décorations, à l’instar de nombreuses Maisons européennes.

Enfin, toutes cérémonies appellent le port de la jaquette et là encore d’une divine façon. La couture de taille permet d’épouser les formes au mieux. Le pantalon à rayures, le gilet croisé, les gants, le haut de forme complètent l’ensemble.

J’entends souvent dire que telle ou telle tenue n’est pas adaptée à telle ou telle morphologie. Souvent par excès de pudeur. Tout peut aller à tout le monde pourvu que ce soit revendiqué et évidemment, bien coupé! Nous le voyons ici.

Julien Scavini

Nick Carraway

Sous ce nom ne se cache pas une personne réelle, mais plutôt un caractère de fiction : Nick Carraway, le voisin à West Egg de Gatsby, et aussi le narrateur du roman éponyme de Francis Scott Fitzgerald, publié en 1925. Je m’intéresse ce soir à l’adaptation cinématographique de 1974 avec Robert Redford.

Si Gatsby est bien évidemment le personnage clef du roman, je trouve tout aussi passionnant d’observer l’évolution de ce personnage secondaire qu’est Nick, voisin du héros et cousin éloigné de l’héroïne jouvencelle. Joué par l’acteur Sam Waterston, il incarne le petit bourgeois qui réussit bien comme broker sans avoir toutefois l’assiette financière des grandes fortunes qui l’entourent. Il loue pour 80 billets un charmant petit pied à terre au bord de l’eau, dans le plus pur style côte est. D’ailleurs, ce roman (ce film) développe et brode sur ce thème jusqu’à incarner un pan entier de la mythologie WASP. Même si la mythologie se finit mal.

Bref, Nick personnage simple et aux moyens limités. Mais divinement habillé pour les besoins du film, par le maître du répertoire, un autre héros des mythes contemporains américains, M. Ralph Lauren en personne, qui fut conseillé costume sur le film. Les publicités Polo RL continuent d’ailleurs de sortir tout droit du film et de son ambiance… Même si le spectre des années 70 déforme quelque peu (mais après tout pourquoi pas) la lecture stylistique des 20’s.

Et donc de découvrir M. Carraway au début du film, sur son cannot en complet blanc, certainement laine/lin ou lin/coton et veste à poches crevées. Puis, l’une des tenues les plus célèbres du cinéma, blazer sur cravate club, pantalon blanc et chemise blanche. Et enfin complet gris et spectator shoes (bicolores). Le trait le plus notable sur ces illustrations sont les chemises à rayures multiples et colorées. Si Gatsby, en retournant son dressing donne à voir des tuniques unis et pastels, il en va autrement de Nick qui arbore de fines rayures, dont les dernières, blanc/beige sur fond jaune, un mélange finalement assez délicat. Et si je me suis souvent méfié des chemises à rayures multiples, certainement pas assez minimalistes à mes yeux, je reconnais volontiers que cela peut-être très élégant, très fin et même plutôt délicat et recherché!

Julien Scavini