Qu’il fait chaud!

Que diable, quelle chaleur à l’atelier ces temps-ci, entre l’énervement des machines à coudre et l’échauffement des fers! Mais alors, que mettre? Si l’obligation de service au client impose, évidemment, le port du costume (nous y reviendrons dans un futur article), la vie d’atelier est plus décontractée. Hélas, les tenues pour être chic et court sont rares.

Notons, en partant du bas le non port de chaussettes. Monsieur de ce mois-ci propose une astucieuse idée pour porter les mocassins nu-pied, sans avoir peur de se bruler les talons sur le cuir, à savoir un petit bas discret, acheté au rayon féminin de la marque (chez Falke). Quant aux souliers, les habituels mocassins, ici dans une version bicolore, ou les derbys type ‘buck’ en veau velours à semelle crêpe sont de sortie. MàJ: D’aucun me souffle également le port des espadrilles, une corde de choix!

Puis, le bermuda. Cette pièce essentielle de la garde robe varie beaucoup dans sa forme. Quelle soit très courte dans un genre short de boyscout ou plus longue, elle apporte un gain en terme de fraicheur non-négligeable. Pour ma part, une longueur autour du genoux protège ma pudeur. La matière est souvent le coton, en version chino ou pourquoi pas en madras. Pensez aussi à vos vieux pantalons de flanelle. Une rapide coupe à mi-mollet permet de confectionner un bermuda à revers. Avec 5cm de revers c’est parfait!

D’ailleurs ce bermuda à revers possède une petite esthétique très années 60 que je ne renie pas. Avec une paire de Persol, c’est tout à fait adéquat. J’ai revu récemment le très bon film de Steven Spielberg ‘Attrape moi si tu peux‘ qui m’a remémoré cette époque où les américains faisaient encore mine de goût. Avec ce bermuda en flanelle, pourquoi ne pas tenter la chemisette…?

Là, je vois les puristes fuirent. Non à la chemisette toute colorée avec une cravate dans l’environnement de travail. Non pratiquement tout le temps à la chemisette. Mais dans ce cas de figure, avec le pli de repassage bien marqué, dans un colori simple, je crois, je pense que c’est une bonne option. La seule autre occasion de porter admirablement la chemisette serait lors d’un quelconque voyage en asie mineure, avec une saharienne. Les militaires anglais en poste sur le sous-continent indien ne s’y trompaient pas.

Sinon, l’habituel polo à manche courte, dont l’origine remonte aux premiers temps du rugby, est toujours d’actualité. Hélas, les vraies mailles de jersey ne se trouvent plus beaucoup. Elles sont pourtant plus aérées que les piqués de chez Ralph Lauren et consort. J’en ai vu récemment chez Charvet, mais à plus de 500€ la chemise-polo, elles sont d’un luxe rare.

Julien Scavini

Frac contre smoking dans les 60’s.

Cet article est extrait du très célèbre magazine masculin ADAM n°262, décembre/janvier 1960/61, aux éditions Condé Nast. J’ai tout à fait apprécié le ton du journaliste (non crédité) à propos d’une soirée parisienne. Il fait suite à la série d’articles sur le frac et le smoking. L’occasion de vous le retranscrire, et de l’illustrer:

« Faut-il le déplorer? L’habit perd pied dans les soirées parisiennes. Le gala de la première représentation de l’International Ballet du marquis de Cuevas justifiait pourtant le port du frac dans le magnifique théâtre des Champs Elysées. Mais les smokings y étaient représentés dans une proportion de 99%. Le marquis lui même était en smoking, alors ses invités se sentaient parfaitement dans le ton. Où est-il, le temps où les habitués de la Salle Garnier ne pouvaient se rendre à l’Opéra autrement qu’en cravate blanche, manteau noir et haut de forme mat? On ne les compterait même pas sur les cinq doigts d’une main lors des soirs habillés actuels. Il faut la présence du chef de l’État pour un gala donné en l’honneur d’un hôte illustre, de passage, pour que réapparaissent les habits – sur lesquels les brochettes de décorations jettent leur éclat coloré. Mais alors combien on s’attristera, lors de l’entrée du théâtre, en voyant nos contemporains gravir les marches de l’escalier d’honneur sur lesquelles les gardes républicains – eux, en grande tenue – saluent de l’éclair de leur sabre les hautes personnalités, vêtues de manteaux de pluie, trench-coats, pardessus beiges en poil de chameau, contrastant si pauvrement avec les visons, les brocarts, les soies des riches manteaux féminins. que de va-nu-tête! Que de gants maculés (bien sûr, le chevreau ne s’accorde guère au contact  du volant). On ne voudrait pas être, ici, censeur impitoyable et grogner une fois encore sur l’évanouissement des traditions d’élégance. Pourtant, que diable! un manteau noir n’est pas un luxe! Il peut être en vigogne, en cachemire, mais aussi en drap d’honnête qualité ; il devient alors à la portée de toutes les bourses.« 

Julien Scavini

Une (grosse) production d’une année de cours à l’AFT

Ce soir, nous allons faire un petit tour en photos de ma production de vestes et autres devants. Car au cours d’une année à l’Assocation de Formation Tailleurs, l’art des poches -nombreuses- nous est enseigné, mais pas seulement. Lorsque nous commençons à maitriser certains détails, la suite logique est de les assembler, sous forme de devants gauche simple (demi-veste en somme) et encore plus avant, sous forme de veste. Évidemment, la formation d’apiéceur en dix mois ne recouvre pas le montage de manches ou du col. Mais, une professeur admirable et un peu d’obstination m’ont permis d’arriver à cette fin. J’ai d’ors et déjà fini trois vestes, ce qui n’est pas si mal, sachant que je suis parti de zéro: sans savoir coudre!

Commençons par les devants, simplement:

  • le premier des meilleurs est ce devant de veste trois boutons, en lainage motif glencheck plaid. 400gr environs. Doublure bemberg rabattue à la soie. Petite erreur de positionnement de la poche intérieure haute, mais ce n’est pas bien grave. Le patron est le mien, sur une coupe à mon idée.
  • le second, ce devant de smoking croisé en lainage bleu nuit, 260gr, avec garniture de satin lourd. Bel essai, mais la garniture est piquée machine, et non rabattue à la main comme c’est l’usage en grande mesure:
  • le troisième enfin, non doublé, sur un lainage fin à rayures 220gr. Revers en pointe très marqué et très haut. Vous découvrez donc l’intérieur de la veste, comme illustré sur les croquis de toiles tailleurs.
  • les vestes maintenant, avec cette première ébauche, dans un joli pied de poule multicolore, en fini cachemire, 320gr. Toujours sur une coupe personnelle, à ma taille. Poches en biais, poche à ticket, revers à cran aigu haut, veste trois boutons et une fente milieu dos très profonde (j’avais l’idée de pouvoir l’utiliser au cheval). Le couvre-col n’est pas posé et les manches non finies, mais je reste content du raccord de la poche poitrine:
  • je me suis ensuite attaqué à une veste qui me tenait à cœur, pour la chasse. Dans un drap moyen (350gr) à chevrons fenêtrés, peut-être Harrisons, elle arbore deux grandes poches à soufflets à rabats et deux poches ventrales passepoilées. Je dispose toujours le cran de col assez haut, peut-être trop? Le dos possède une martingale (le plus sympathique détail pour une veste) et une fente milieu. Les bas de manches sont à quatre boutons, dont un dissimulé (à la Saint Laurent). La doublure intérieure est une moire d’acétate, très résistante et imperméable:
  • ensuite, petit travail pour ma sœur qui devenait jalouse 🙂 Une petite veste en serge de laine (qui ressemble à du jean), dans une coupe près du corps avec un revers rond années 30. Surpiqure évidemment main en blanc pour rehausser et doublure demi-dos:
  • j’ai ensuite essayé un petit gilet dans un tartan de chez Harrisons. Je devais avoir le pantalon, mais le culottier l’a raté, ce qui arrive, dans une école:
  • d’ailleurs en parlant de ratage, voyons cette veste en prince de galles en lin/laine, que je n’arrive pas à finir, à cause des manches, de leur raccord et de leur embu principalement! J’avais essayé un revers extra-large, pour tester, et imiter les dernières collections polo RL:
  • puis, j’ai enchainé sur mon stroller, vous savez, je vous en ai déjà parlé ici. J’ai réalisé la veste deux boutons à cran aigu et le gilet croisé à cran aigu dans une toile anthracite (350gr). Le résultat porté n’est pas si mal, même si les manches grignent un peu par endroit. Quant au pantalon à deux plis, il m’a couté 105€ en mesure chez Gambler, ce qui reste le meilleur rapport qualité/prix de Paris! Et fabriqué en France qui plus est. La boutonnière de revers à la milanaise est toujours faite maison:
  • enfin, la dernière veste en date, ma préférée et ma plus réussie (même si le col une fois porté tombe un peu bas). Dans un beau tissu Wain Shield en 300gr, j’ai réalisé ce petit blazer à poches plaquées (bordées en haut), semi-doublé. Le bords sont entourés d’un biais de coton bleu et les fonds de poches réalisés en coton de chemise blanc rayé bleu.  Les boutons sont recouverts et mes initiales en feutre cousues sous le col. Toutes les coutures y sont couchées ( et non ouvertes) y compris pinces et épaules:

Voilà pour ce long tour à travers une année de création, quasiment une année pour ce blog aussi. Il n’est évidemment pas conseillé de réaliser autant de travaux en si peu de temps. Je n’ai en tout cas jamais vécu d’année si brève et n’ai pas arreté une seconde de travailler, pour produire toujours et encore. Que voulez-vous, quand on aime, on ne compte vraiment pas. Mais je suis assez heureux du résultat et de l’expérience accumulée, ce qui sera fort utile pour la suite! Julien Scavini

Les toiles tailleurs

En cet avant dernier jour du CAP tailleur, il fut intensément question dans ma tête de la découpe des toiles et aux plastrons qui composent l’essentiel d’une veste de tailleur. Rigidifiant le lainage du devant de la veste, ces toiles ont d’autres propriétés, qui dépendent de la méthode de pause ou de l’esthétique générale de la veste. Ils forment le soubassement du veston. Alors que l’industrie les ont rendus légères, à grands coups  de thermocollage, les tailleurs ont toujours recours à d’ancestraux systèmes de piquotage, donnant du galbe au devants, formant la poitrine. Et tout ne se joue pas au fer, au contraire! Nous allons tâcher d’y voir plus clair, entre les différentes approches tailleurs (car évidement, autant de méthodes que de tailleurs). Accrochez vous, cet article en forme d’encyclopédie est réservé aux plus connaisseurs!

Récapitulons d’abord la hiérarchie. Tous les tailleurs utilisent en premier lieu la toile tailleur, ou toile de corps, constituée de laine vierge à 100%. Tissée grossièrement, elle contient encore beaucoup de suints, utiles au travail au fer. Il convient de la faire décatir plusieurs heures dans une bassine d’eau avant de la travailler.  Cette toile, malgré sa grossièreté de tissage, existe dans un nombre quasi infini d’épaisseur et de poids, permettant à chaque professionnel d’adapter son choix au lainage. Cette toile occupe une bonne partie du devant, y compris les revers lainage, lesquels sont brochés sur celle-ci à l’aide de points de chevrons (invisibles).

Vient ensuite le plastron, le plus souvent en laine et laine de chèvre et/ou laine et crin de cheval. Ces plastrons, plus petits, possèdent ce que l’on appelle du ressort, c’est à dire qu’ils réagissent avec vigueur aux tentatives d’écrasements. Ils ne se froissent donc pas et ont la mémoire de la forme.

Enfin, pour protéger la doublure intérieure des longs poils rêches et secs des plastrons, il est coutume de recouvrir une bonne partie de l’ensemble plastronnant avec un matériaux duveteux. Certains utilisent des ouatines de coton ou de polyester, d’autres de fins mohair ou du feutre etc…

Sur les schémas ci-dessous, j’ai tâché de résumer diverses méthodes de découpes et/ou d’assemblages des toiles composant le plastron. Les trois premiers exemples présentent, en plus d’une vue de face extérieure, trois intérieurs possibles. Les hachures oranges représentent  la ouatine qui cache tout le reste. Les hachures bleue figurent une bande (en percaline ou en doublure), coupée en droit-fil ou en biais, et qui permet de maintenir le roulant du revers à sa place. Il réalise une butée. Il est donc nécessaire de connaitre le type de boutonnage (2 ou 3 ou voire 4 boutons) pour régler le revers (à la différence des vestes de prêt-à-porter où les marchands modifient à l’envie et à grands coups de fer le revers). Les zigzags oranges représentent la liaison machine ou zigzag machine (qui permet de tenir une pince, par l’intermédiaire d’un petit bout de doublure en biais). Toutes les épaisseurs sont rendues solidaires par de grands points de chevrons (nous y reviendrons). De plus, le passement est représenté en rouge (largeur 1cm en réalité):

Trois possibilités donc:

A: la toile tailleur est coupée en plein biais. C’est une option assez peu vue, mais qui existe. Les avantages sont: déformer très facilement la toile à la clavicule (flèche) pour obtenir le travail de la souplesse à l’épaule; lutter contre la déformation en biais du lainage du devant. Évidement, la passement en bordure de veste (bande de coton en droit-fil, 1cm de large, glacée sur le bord tout autour de la veste, pour fixer notamment les arrondis de la veste, qui se sont pas en droit-fil. Ce passement est posé à cheval sur la toile tailleur et sur le lainage, au bord de la piqure de garniture intérieure) sera posé sans souplesse, à plat, pour contrebalancer l’effet diagonal. De même, l’arrêt de revers (hachure bleu) est posé en biais, car l’un sur l’autre, ils se compensent. L’inconvénient majeur est la non reprise du poids des poches, à cause du biais.

Ensuite, le plastron (chèvre laine) est coupé en droit-fil, et des crans sont réalisés en haut, pour permettre la déformation sous le fer de la clavicule. Avec la chaleur, l’humidité et le poids du carreau tailleur (le fer de 5, 7 voire 14kg), il est possible de fortement déformer cette zone, pour créer le ‘godet’.

Il est également possible d’y adjoindre un plastron annexe de crin de cheval/laine, avec beaucoup de ressort. Les deux plastrons, de forme quasi équivalente (l’un est plus petit de 1cm en périphérie) ainsi que le pied d’éléphant (la dernière petite partie que l’on dispose à l’épaule) donne de l’épaisseur aux plastrons, un effet d’armure, qui choque au premier abord, mais satisfait de nombreux amateurs. C’est la méthode utilisée par exemple chez Guilson à Paris.

NB: les sacs de poches (côté et poitrine) sont basculés derrière les toiles, soit après coup (et donc glacé), soit réalisés directement dedans (meilleur solidité alors).

B: Cette fois ci, la toile est coupée en droit-fil. Pour former l’épaule, un autre morceaux de toile tailleur (en biais ou en droit fil) est cousu en haut, ce que l’on appelle la plaque d’épaule. Avec la déformation au fer, cela permet de bien créer le ‘godet’. Sa découpe en rond et son accrochage à la toile permet éventuellement de prêt-former ce trop-plein de tissu. Ici, le passement est posé avec beaucoup de souplesse, voire des vagues (montage à l’italienne). Cela évite au plus haut point les effets de rides au bord de la veste, qui sont dûs (dans la méthode A) au rétrécissement du passement coton (et oui, encore une tuile à prévoir). Aussi, chez Camps, la ouatine descend très bas (ce qui est une bonne idée à mon goût).

Alors, le plastron chèvre/laine sera coupé en biais. Il est également possible d’y coudre une autre plaque d’épaule, ce que Camps de Lucca réalise. Ils disposent également un autre plastron chèvre/laine, plus petit, pour asseoir la forme. Il est également possible d’élargir la découpe du haut du plastron, pour ensuite chercher à la faire correspondre à la toile, moins large. L’effet est évident: un godet se crée qui sera résorbé par le travail à la main de piquotage. Et enfin le pied d’éléphant.

NB: les poches, par exemples, ne subissent pas le même traitement. La poche poitrine reste coincée entre la laine et les toiles, alors que la poché côté est basculée derrière et glacée. Pour la poche poitrine, je trouve que c’est clairement un inconvénient, tout mouchoir de pochette ou lunettes marquant alors un ‘bombé’ sur le devant.

C: Enfin, un variante de la méthode B, qui consiste non plus à réaliser une plaque d’épaule, mais une ‘quille’. Il s’agit de fendre le haut de la toile tailleur, et d’y insérer un biais en forme de triangle, que l’on zigzag. L’effet est immédiat et crée le ‘godet’. Cette méthode est indiquée dans les tissus très fins, ou le zigzag horizontal de la plaque d’épaule (B) pourrait marquer.  Si le tissu est fin, évidemment, le deuxième plastron sera éjecté du lot.

NB: ici, les poches peuvent être exécutée à l’inverse de la B. Mauvaise idée, la méthode A, à ce niveau, étant la meilleure (toutes poches à l’intérieur).

Évidemment, à propos des poches, elles peuvent être réalisées avant, ou après la mise sur toile. Personnellement, j’aime faire les poches côtés avant, puis les faire basculer et les glacer. Quant à la poche poitrine, je trouve que la réaliser directement dans la toile, une fois l’entoilage effectué, est un gage de solidité.

Pour ce qui est du ‘godet’ de clavicule, vous avez sans doute compris que c’est un élément essentiel. En effet, avec l’aide de l’épaulette (fine ou épaisse), ils compenseront le creux de la clavicule, cet os qui règle les mouvements de l’épaule et du bras. Ce ‘bombé’ créera sur le devant une ligne nette, qui ne marque pas l’os et donne de l’aisance (regardez les épaules des costumes deux boutons grande mesure Arnys de François Fillon: impeccable). Au moment de bâtir le dos et les devants ensembles, il s’agira de bien ‘jouer’ avec ce godet, avec un travail incroyable de la main disposée en creux, pour positionner la souplesse, travail dit ‘à l’italienne’, encore…

Tous les petits éléments de ce plastronnage sont finalement rassemblés ensemble, les uns sur les autres, au niveau de la poitrine et de l’épaule, comme le montre la première figure ci-dessous. Une ouatine recouvre donc ensuite le tout, avant le piquotage. Ce piquotage, composé de quelques centaines de points mains (de temps à autres à la machine) prend l’aspect de chevrons, d’où le nom du point. Il peut-être réalisé dans plusieurs sens: du milieu vertical à gauche puis à droite et la plaque d’épaule (1) ou du milieu horizontal vers le bas puis vers le haut et la plaque d’épaule (2). Voilà deux grandes écoles. Pour le biais qui arrête le revers, il est rapporté ensuite, et repiquoté, avec un point identique mais plus petit. Enfin, le revers est broché sur la toile, avec le même point, mais petit cette fois (que Camps, hélas, réalisent à la strobel-machine à ourlets invisibles). La méthode 1 permet une meilleur prise en main, et par grattage sous la main, un meilleur bombé naturel. La deuxième est plus adaptée au long plastrons et laisse le champ plus libre pour le travail au fer.

Voici donc un résumé, forcément partiel, de tout l’art qui se cache derrière la poitrine bien formée d’une veste de tailleur. Nous sommes très loin ici des vestes ‘mornes plaines’ du prêt-à-porter, où le thermocollant n’arrive jamais vraiment à créer une forme et à la maintenir. Au contraire, tout le pouvoir de la confection réside ici, dans ces quelques épaisseurs de matériaux, rendues solidaires et travaillées longuement sous le fer, pour dessiner l’empreinte du client, jeune ou âgé, dont les pectoraux ne sont jamais identiques ou au même endroit. J’espère avoir été aussi clair que possible, même si cela peut paraitre brouillon. Évidemment, le tailleur est une science vivante qui s’accommode assez peu de l’écrit…

Julien Scavini