Le pantalon est certainement le parent pauvre de la culture générale sur l’art tailleur. Si les sujets sur la veste et quelques fois le gilet viennent en tête des articles et desiderata des lecteurs, cette longue pièce couvrante constituée de deux jambes est pourtant une pièce d’intérêt. Mais elle est difficile à décrire finalement. Nous allons essayer ce soir d’expliquer quelques grandes lignes de coupes et de détails, qui pourront vous être utiles lors de vos visites chez le tailleur.
Sur cette première image, on peut constater une coupe droite traditionnelle, à poches en biais (de 4 à 7cm de décalage sous la ceinture). La braguette peut-être à zip ou à boutons. Le devant présente deux pinces (ou aucune). La ceinture ne possède pas de passants de ceintures, mais un tirant à bouton. Au dos, nous trouvons deux poches passepoilées classiques à fermeture par boutonnière. La ceinture dos arbore un V d’aisance au milieu, adapté pour le port avec des bretelles. Il est possible de faire réaliser les bas de son pantalon avec un ourlet simple ou un revers. Pour ma part, j’aime les revers un peu haut, aux alentours de 5cm.
Ici, le devant présente un pli (en non une pince). Ce pli peut-être orienté vers l’intérieur (à la française) ou l’extérieur (à l’italienne). Le pli donne de l’aisance et évite au pantalon de coller, surtout aux lainages qui peuvent présenter un effet stretch à la longue, surtout en position assise. Les poches sont un modèle sport, apprécié des De Luca par exemple. Le tirant de ceinture est maintenant à glissière (avec une bride comme les ceintures), ce qui est plus solide que celui à boutons. Les poches arrières sont à rabat, qui peut être ou non boutonné. Ces poches à rabat en accolade inversée sont une bonne option pour les pantalons sports, comme ceux pour le golf. Par ailleurs, le dos présente deux pinces, ce qui est fortement indiqué dans le cas de fessiers marqués.
Sur ce modèle, le devant présente deux plis, ce qui est le nec plus ultra de l’aisance. Évidement, un tel pantalon sera également un peu large en bas (+ de 22cm) pour obtenir une ligne homogène, le seul point négatif étant son petit aspect ‘daté’ (certainement une question de mode…). Ici, les poches sont passepoilées et verticales. Ce genre de montage est idéal pour les pantalons de smoking, même s’ils n’ont pas vraiment besoin de poches… Pour ce qui est du dos, vous pouvez choisir de ne disposer qu’une poche, à droite si vous êtes droitier par exemple. Le fait est que ces poches ne sont pas d’un grand intérêt. Essayez de mettre un portefeuille la dedans et vous ressemblerez à un sac. Mais un pantalon sans poche fait un peu plus féminin. En revance, sur un pantalon en lainage fort, comme un whipcord ou un cavalry twill (le genre de pantalon que vous désirez garder trente ans), choisissez peut-être aucune poches dos, car c’est irrémédiablement un point de faiblesse! Un troisième type de poche dos peut-être passepoilée avec une languette de boutonnage.
Sur l’avant du pantalon, à droite sous la ceinture, peut aussi être disposé une poche gousset. C’est un petit logement grand comme une carte de crédit (d’ailleurs très pratique pour elle) que certains bons confectionneurs affectionnent. Cette petite poche gousset peut aussi avoir un rabat en accolade inversée, ce qui est du dernier chic! J’ai vu à Saville Row un tailleur porter un pantalon à deux plis avec bretelles et poche gousset à rabat, extraordinaire!
Enfin, vous pourrez demander, puisque c’est devenu la norme aujourd’hui, des passants de ceinture. En grande mesure, nous en disposons habituellement sept dont un ardillon. L’ardillon est un passant recourbé en forme de boucle qui surgit du bas de la ceinture au dessus la braguette, et qui sert à y bloquer la boucle de ceinture. C’est la plus merveilleuse invention du pantalon, qui évite que la ceinture ne tourne autour de la taille! Et pour ce qui est de la fermeture au niveau du pont de la braguette, les tailleurs recommandent deux crochets métalliques et un bouton de rappel. Les boutons ont en effet tendance à sauter, même avec une couture au fil de lin.
Voilà pour ce petit aperçu des possibilités d’un pantalon en terme de détail. Je rajouterai encore la possibilité de faire réaliser une baguette. Il s’agit, uniquement sur les pantalons dépareillés (qui ne constituent pas un costume), comme les pantalons de flanelle, de coucher la couture coté extérieure, et de la coudre, ce qui crée une baguette le long de la jambe. C’est un détail de goût. Enfin, si la mode des pantalons est aux modèles serrés, préférez tout de même l’aisance, car la laine n’est pas comme le coton et ne se comporte pas très bien lorsqu’elle est près du corps, surtout avec des vrais chaussettes qui montent jusqu’aux genoux, et qui agripperont le pantalon d’une désagréable manière une fois assis!
Enfin je finirai sur une petite question: dit-on un pantalon, ou un paire de pantalons au pluriel pour désigner une pièce unique??? C’est comme la salade verte, un mystère dirait Jean Carmet!
Julien Scavini