Bel été

L’été est là, il est temps de relâcher un peu le rythme, à défaut d’être tout à fait en vacances. L’année fut riche et tumultueuse. Je vous souhaite alors un bel été.

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Je profite de ce dernier billet avant l’automne pour vous encourager à voir un film, Julie & Julia, comédie dramatique américaine datée de 2009.  Ce film tout à fait délicieux relate le destin croisé de deux femmes : l’une a fait découvrir aux américains la cuisine française dans les années 50 et 60, l’autre a remis au goût du jour ces recettes dans les années 2000. Le film entrecroise les deux époques et les deux récits d’une manière très honnête.

Julia Child est peu connue en France. Cette américaine, qui ressemble assez à Maïté dans la façon d’aborder poulets et autres victuailles, s’est prise de passion pour notre gastronomie dans les années 50, lorsqu’avec son mari diplomate, elle s’est installée à Paris. Elle n’a eu de cesse dès lors d’apprendre à cuisiner et surtout de faire aimer la bonne cuisine et les produits frais aux américains. Un destin hors du commun. Elle présenta même pendant 10 ans une émission télévisée sur le sujet. Elle est jouée par une Meryl Streep au sommet de son art, mariée à Stanley Tucci, déjà vu sur Le Diable S’Habille en Prada. La mise à l’écran du Paris des années 50 est absolument formidable, un délice suranné plein de fraicheur, un bonheur. Les costumes de Stanley Tucci, mélange de conservatisme bureaucratique et de décontraction américaine, sont très élégants.

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Julie Powell, de son côté, s’était lancée comme défis dans les années 2000 de refaire toutes les recettes françaises – et elles sont nombreuses – du livre de Julia Child Mastering the Art of French Cooking.  Au delà des mets absolument délicieux cités à l’écran (ah cette sauce hollandaise!), elle est l’une des pionnières du blogging. Et la première personne dont le blog est devenu le sujet d’un film, de ce film. Réalisation qui mêle donc les thèmes : deux femmes qui s’ennuient à deux époques différentes, deux manières différentes de s’occuper et surtout, deux manières de partager son savoir. Un film rafraichissant, plaisant et gourmand. Petites audiences à l’époque, c’est dommage. Un film gastronomique qui devrait plaire aux français pourtant, il met à l’honneur leur art, l’élégance culinaire !

 

Bel été ! A bientôt. Julien Scavini

Pochette et cravate identiques

La semaine dernière, mon petit paragraphe sur le fait que jamais une pochette et une cravate ne doivent partager le même tissu a beaucoup fait réagir. Je ne m’y attendais pas et j’ai été bien démuni, pensant que ce bête axiome était logique et partagé. J’ai demandé son avis à Adriano Dirnelli, contributeur habituel de Parisian Gentleman, connu pour son tumblr généreusement entretenu.

Merci d’avoir attiré mon attention sur les commentaires surpris de tes lecteurs, qui ont réagi avec véhémence la semaine dernière lorsque tu as écrit que la pochette et la cravate ne doivent jamais être du même tissu. Cela me paraît d’une telle évidence que je n’ai jamais songé à le mentionner explicitement dans mes propres écrits. Des lecteurs ont pointé (à tort) que je n’ai pas mentionné cette règle dans mes « 10 commandements de la pochette » publiés sur Parisian Gentleman. J’attire l’attention de tes lecteurs sur mon commandement numéro 5 :

V – TROP DE COORDINATION À TOUT PRIX TU ÉVITERAS

Je suis d’accord avec toi que la coordination parfaite entre la cravate et la pochette, dans le même tissu, est évocateur d’un coffret-cadeau de mauvais goût trouvé en boutique aéroportuaire.

Toute la difficulté du choix de la pochette réside justement dans l’évitement d’une coordination trop évidente, trop simpliste. Il faut avoir de imagination et du goût. Le sens de l’esthétique requis me fait penser à l’ikebana, l’art japonais de l’arrangement floral. Il convient de savoir coordonner avec un certain raffinement artistique les couleurs, les motifs et les matières.

Adriano Dirnelli

Fait amusant, ce dimanche alors que je me trouvais sur le pas de ma porte de boutique, j’ai vu un monsieur passer, qui était habillé exactement comme mon dessin. Sa pochette et sa cravate étaient du même tissu, un beau jaune.

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Pour ma part et pour aller plus loin, je tiens à préciser que jamais je n’oserais dire que cet ensemble est de mauvais goût ou mal choisi. Non, c’est un effort qui est fait et je tiens ainsi à relativiser mon point de vue. C’est assez esthétique. Et mieux qu’être mal sapé ou sans pochette.

Simplement, cela ne se fait habituellement pas. Aucun manuel d’élégance ou de savoir-vivre n’a jamais écrit que cela était de bon ton d’avoir la panoplie. C’est un fait, cravate et pochette ne partagent pas le même tissu. Toutefois, le faire n’expose personne aux flammes de l’enfer, et si c’est fait avec dignité, je n’y vois pas d’inconvénient. J’y trouve un petit côté vieux milliardaire qui s’habille chez Dunhill et Charvet.

Il faut noter qu’il n’y a nul snobisme à cette règle. Historiquement, les pochettes sont plutôt blanches. Les années 30 et 50 consacrèrent ce point. La pochette colorée est apparue plus tard, même si les illustrations d’Apparel Arts distillent quelques modèles colorées ça et là. Les années 70 ont probablement répandue l’idée que les pochettes pouvaient être en soie vaporeuse et que cette soie pouvait être bariolée, extravagante. Il n’a fallu qu’un pas à des boutiquiers et habilleurs quelconques pour proposer des boites 2 en 1, pour faciliter la vie des hommes pressés. Tout un symbole pour moi du chic tapageur des années 90 ; quand parfois les bretelles étaient aussi raccord.

C’est un truc de boutique que de vendre la pochette et la cravate ensemble. Cela fait double vente. Et ne représente aucune complication pour le vendeur et le client. Un peu comme vouloir caser une ceinture avec une paire de soulier, dans le même cuir.

L’élégance, la vraie, est faite de complexité en même temps que de finesse. Il faut montrer une certaine réflexion, un art de faire sa mise. Les raccourcis sont rarement synonymes de dur labeur. Parisian Gentleman a écrit ce fameux article pour décrypter les us et coutumes de la pochettes. Il montre bien comment rechercher la finesse par le mouchoir : blanc / couleur dominante / couleur secondaire / ou couleur latente.

La pochette colorée est de manière générale un objet difficile à manier. Je préfère la pochette blanche ou à fins liserés bleus. Sur un tweed, pourquoi pas apporter de délicates couleurs épicées, mais il faut faire attention à ne pas empiéter sur la cravate. Il ne peut y avoir deux rehausses de couleur. Soit une cravate éclatante, soit une pochette. Les deux, c’est beaucoup. Comme avoir une montre à chaque poignet.

Belle semaine. Julien Scavini