Lorsqu’il s’habille de manière décontractée, le gentleman passe du registre ville au registre sport. D’un choix relativement restreint (du gris, du bleu, un peu de rayures etc.), il passe alors dans catégorie bien plus étoffée, c’est le cas de le dire ! Le choix est très vaste, uni, un peu de rayures et beaucoup de carreaux, un peu de gris, beaucoup de bleu ou de marron, mais aussi du vert, du rouge, du jaune, du violet etc. suivant ses goûts et ses couleurs.
Coordonner cet ensemble n’est pas chose aisée. Evidemment, s’habiller peut être un art. Et comme tous les arts, il est difficile. Les choses belles sont ardues. Mais l’habitude, la routine et l’expérience permettent de palier aux difficultés.
Premièrement, il convient de bâtir un ensemble stylistique basé sur la couleur, deux ou trois en général. En général, les coloris anglais sont plutôt foncé, alors que ceux italiens sont plus clairs. Construire sa tenue à partir d’une ou deux couleurs, de leur accord, est une idée assez contemporaine. Classiquement, c’est à dire de manière anglaise, le vêtement se pense par usage et non par couleur. La cravate régimental se porte par usage et convention, parfois sans importance pour la couleur.
Je vais donc être très précautionneux sur ce point. Le point de vue classique est anglais. Mais les anglais étant (je trouve) assez peu adroits avec les couleurs, ils peuvent faire des mélanges osés, frisant parfois le mauvais goût. C’est par exemple le cas en décoration d’intérieur… Certaines pièces de leurs manoirs peuvent heurter le goût classique français.
Construire sa garde robe autour de deux couleurs fétiches (avec leurs variantes, claires ou foncées) est une excellente idée de départ.
Au delà de la couleur se pose aussi la question de la tonalité (sombre ou clair), principalement entre le haut et le bas.
C’est aussi une question essentielle. Habituellement dans une tenue sport, la veste est plus foncée que le pantalon, ou les deux sont de la même tonalité. Les anglais affectionnent je pense un peu plus les ensemble foncés, alors que les italiens, soleil oblige ont tendance à éclaircir leurs tenues.
La veste dans une tenue sport peut tout à fait être plus claire que le bas. C’est tout à fait possible. Si la veste est de la même couleur que le pantalon, ou d’une couleur approchante, l’effet pourrait être désastreux en terme d’élégance, donnant une fausse impression de costume. Sauf si c’est la matière qui apporte une différence par la texture par exemple. Haut et bas de même couleur claire, mais l’un mat l’autre plus satiné. Et encore…
Une tenue composée d’une veste claire peut poser problème. Le pantalon doit trancher. La plupart du temps, cela se fera par la couleur (veste beige, pantalon orange comme sur l’illustration). Cela peut aussi se faire par la tonalité (veste gris clair, pantalon de flanelle anthracite). Vous pouvez ainsi jouer sur les deux tableaux (pantalon aussi clair mais coloré, ou pantalon de même couleur mais très foncé). Il faudra éviter seulement la couleur d’une tonalité approchante donc.
La couleur est le plus souvent la réponse idéale, surtout l’hiver, où les velours permettent un large panel de configurations. Par exemple veste gris clair avec pantalon côtelé vert fougère. Il ne faut pas hésiter.
Les italiens pourraient par goût de la provocation faire le discours inverse. Avec une veste poil de chameau, ils chercheraient un bas encore plus clair ! Presque blanc, comme une moleskine crème par exemple.
Finalement, l’art de s’habiller, c’est l’art de tout accommoder ! Comme une bonne cuisinière. C’est certes moins académique, mais c’est très bon.
Le vestiaire classique anglais que nous idéalisons (car comme je le répète, dans sa forme usuelle, il est parfois l’occasion de bien des incongruités visuelles) est normé : les couleurs froides de la ville ensemble, les couleurs des feuilles mortes entre elles. Les mariages sont le plus souvent simples : harmonie des couleurs, dialogue entre les textures et matières, concordance de la luminosité et du contraste.
La vision contemporaine peut donc être plus biaisée. La sprezzatura de nos amis italiens ose plus. Ainsi, il est possible de justifier plus d’idées, avec art et manière. Le tout est d’affirmer son point de vue !
Julien, merci pour ce billet qui pose le problème de la coordination de la veste claire. Pour moi ce n’est pas le pantalon qui pose souci. On trouve facilement un contraste ou un dégradé pour le marier avec la veste. Non, le noeud gordien, c’est d ‘assortir ce que l’on porte entre la veste et le pantalon (chemise ou pull), notamment si l’on souhaite éviter le col roulé…Il faut une suite à ce billet !
merci pour ce bel exposé …
La question du pullover ou du gilet est délicate car il doit s’accorder avec à la fois le pantalon et la veste. En présupposant que la chemise est neutre (bleu ciel par exemple), il y a plusieurs solutions. Ma préférée est la suivante: pull dans les teintes du pantalon et contraste avec la veste; le raccord se fait avec la cravate et le noeud papillon. La situation est différente quand je ne porte pas de veste mais un gilet de laine ou ou pull seul; dans ce cas, j’opte pour une opposition franche.
Pour arriver au bon choix, je construis toujours mes tenues dépareillées dans l’ordre suivant: pantalon, chaussettes de même couleur, chemise, pull/gilet, veste et enfin cravate; sans oublier le manteau.
Voilà un argumentaire appréciable !