L’Australie et la Nouvelle-Zélande produisent aujourd’hui les plus belles qualités de laine, car les souches mérinos s’y sont particulièrement bien acclimatées. Mais le mérinos australien n’est pas une race homogène et unique. Les australiens distinguent quatre variantes de mérinos.
Mérinos Peppin
Cette souche est si importante que partout en Australie, les éleveurs classent souvent leurs moutons simplement comme étant soit du type Peppin, soit non-Peppin. Ce nom vient des frères Peppin, qui créèrent un haras en 1861 à 250km environ au Nord de Melbourne, à Deniliquin. Si des souches françaises et espagnoles ont servi de base à l’élevage, c’est un bélier exceptionnel de race mérinos – Rambouillet (que les australiens appellent ‘Emperor’) qui a donné naissance à la lignée mérinos-Peppin.
On estime aujourd’hui que 70% des mérinos australiens sont descendant directement du mouton développé par Peppin. Sa toison épaisse s’inscrit dans le milieu de gamme des qualités de laine mérinos. La laine du Peppin est protégée des excès de l’environnement par une teneur relativement élevée en graisse naturelle (le suint), apportant une teinte crémeuse au drap de laine.
Le Peppin est particulièrement répandu dans les troupeaux de moutons du Queensland, de Nouvelle-Galles du Sud, au nord de Victoria et dans les zones de production mixte de l’Australie du Sud et de l’Australie occidentale. La race est si adaptable qu’elle peut également être trouvée en grand nombre dans les régions pluvieuses de Victoria ou de Tasmanie.
Les vieilles statistiques de l’époque de la colonisation montrent qu’en moyenne, les mérinos du début produisaient 1,5 à 2kg de laine moelleuse chaque année. De nos jours, un bélier mérinos Peppin peut produire jusqu’à 18 kg de laine, et il n’est pas rare que les animaux commerciaux de cette race produisent jusqu’à 10 kg chaque année.
Mérinos d’Australie méridionale
Alors que les moutons Peppin ont été développés pour le climat tempéré des pentes et des plaines, les mérinos d’Australie méridionale ont été spécifiquement élevés pour prospérer et fournir du rendement dans des conditions pastorales arides, rencontrées dans une grande partie du pays-continent.
Les précipitations dans ces régions sont généralement de l’ordre de 250 mm par an ou moins. Des arbustes ou des plantes herbacées constituent une grande partie de la végétation naturelle.
Le mérinos sud-australien est physiquement la plus grande des souches de moutons mérinos du pays. Ils sont généralement plus longs, plus grands et plus épais que les types Peppin.
La laine de ces moutons est la moins bonne des mérinos (diamètre de la fibre très important). Il a également tendance à contenir une trop grande proportion de suint, idéale pour que le mouton se protège du soleil, mais défavorable au textile.
Mérinos saxon
Les moutons mérinos saxons se trouvent exclusivement dans le sud de l’Australie, où les pluies sont abondantes, en particulier sur les hauts plateaux de Tasmanie, dans les régions froides et humides de Victoria et sur les plateaux de la Nouvelle-Galles du Sud. C’est l’opposé du mérinos d’Australie méridionale.
Physiquement c’est le plus petit des types mérinos, produisant peu de laine (3 à 6 kg). Mais le saxon est sans égal pour la qualité produite. Par exemple, un mouton produisant des fibres 14 microns (soit environ super 190) donnera 3 kilos de laine et un mouton de 17,5 microns (soit environ super 120) donnera 6 kilos. Attention, dans une toison, toutes les fibres ne sont pas aussi douce. Il y a un tri à faire.
Cette laine est extrêmement brillante et de couleur blanche, douce à manipuler et fine. Ces caractéristiques en font une matière recherchée par l’industrie textile pour produire les tissus les plus coûteux.
Les différentes qualité de fibre et leurs usages
Une foie coupées, les toisons sont lavées (souvent en Chine, car cette activité est contraignante pour l’environnement) puis peignées pour en retirer les plus belles fibres et les trier. C’est la capacité de la race ou d’un cheptel à produire tel ou tel pourcentage de fibres classées X ou Y qui permet de faire ce classement. Voici les types :
- L’ultrafine
L’ultrafine est la fibre de laine la plus douce au monde. Le diamètre des fibres doit être compris entre 12,5 à 17,5 microns (super 230 à super 120). Les éleveurs se concentrant sur les microns extra fins peuvent d’ailleurs aller jusqu’à 11,25 microns, et même un peu en dessous. - La super fine
De 17,6 à 18,5 microns, soit de super 120 à super 100. - La fine
De 18,6 à 19,5 microns, soit de super 100 à super 80. - La fine-moyenne
De 19,6 à 20,5 microns, soit des laines peu utilisées pour les draps à costumes, sauf mélanges ou tissus rugueux type tweed.
Au delà, on parle de laine ‘moyenne’, de 20,6 à 22,5 microns. Ces lainages servent à confectionner des vêtements tricotés, mais peuvent aussi servir pour les draps de costumes d’été, solides malgré des tissages aérés. C’est d’ailleurs pour cela que les draps d’été ne font pas mention du terme super, ce n’est pas ce qui est recherché là.
Et enfin, après 22,6 microns, la laine est considérée comme ‘forte‘ et sert aux mélanges bas de gamme pour l’habillement, et dans l’industrie : draps d’habillage dans l’automobile et l’aéronautique, décoration d’intérieur, etc…
J’ai demandé à Holland & Sherry quelques informations sur leurs lainages pour faire le raccord avec ces deux articles. Chez Holland & Sherry, presque toutes les fibres viennent de mouton mérinos, même le fameux sherry-tweed. Seuls les Harris tweed sont produits par des moutons Scottish Blackface ou Cheviot.Voici un petit tableau qui donne des informations intéressantes :
Liasse H&Sherry | Composition(s) de la liasse | Race | Origine |
Sherry Tweed – 8188xxx | |||
100% Wool | Sheep = Ovis Aries | Sheep = New Zealand | |
100% Wool | Sheep = Ovis Aries Aries | Sheep = Australia/New Zealand/South Africa | |
100% Wool Worsted | Sheep = Ovis Aries Aries | Sheep = South Africa | |
78% Wool 12% Silk 10% Nylon | Sheep = Ovis Aries Aries Silkworm = Bombyx Mori | Sheep = Australia Silkworm = China | |
Harris Tweed – 8919xxx | |||
100% Wool – 33µ | Sheep = Ovis Aries Orientales | Sheep = United Kingdom | |
Royal Mile – 318xxx | |||
100% Wool – 16,5µ – s140 | Sheep = Ovis Aries | Sheep = Australia | |
Cape Horn – 667xxx | |||
99% Wool – 18,5µ – s100 1% cashmere | Sheep = Ovis Aries Aries Goat = capra hircus lainger | Sheep = Australia Cashmere = China |
Certaines races de moutons mérinos sont si exclusives, que le nom de race devient une marque déposée. Par exemple, la race mérinos Escorial est une sorte de légende, plus douce que le cachemire. Elle est distribuée par le drapier Standeven . Chez Holland & Sherry, deux races de mérinos sont exclusivement distribuées : le mérinos Gostwyck d’Australie, avec tout un volet développement durable, et le mérinos Monadh d’Ecosse.
Petite aparté, les lainages dit ‘lambswool’, c’est à dire provenant des agneaux ne sont pas forcément de race mérinos. J’ai trouvé peu d’information. Je me demande si ce ne sont pas du coup les toisons des agneaux que l’on mange, donc de toutes races…?
Je vous laisse enfin deux brochures d’Holland & Sherry à propos du Monadh et du Gostwyck si vous voulez plus d’informations et de belles photos !
Belle semaine, semaine prochaine, pas de blog! Julien Scavini
*Bonjour, et merci pour l article. Passionnant, comme d habitude.* *Vous pouvez SVP m envoyer le lien vers la Partie 1 ?* *J ai tente de la rechercher sur le site, je ne la trouve pas :*
* »La laine mérinos, partie I »*
*Merci !*
Bonjour Monsieur,
En l’absence de commentaires sur cet article fort instructif, je sors de ma réserve afin de vous remercier pour la grande qualité des écrits que vous partagez avec vos lecteurs. Vous lire est toujours un grand plaisir et pour moi un rendez-vous attendu chaque début de semaine.
Bien cordialement,
Bonjour,
Je recherche des informations sur la laine Escorial, j’ai lu quelle serait plus résistante que le merinos, qu’elle aurait des propriétés qui lui permettrait de moins froisser.
Je viens de recevoir un échantillon (Escorial Company, filiale de Luxury Fabrics, qui est aussi la maison mère de John Foster).en frottant le tissu, j’observe que des petites fibres se détachent; en comparaison, avec les échantillons Super 150 de John Foster, cela ne se produit pas. J’en viens donc à douter de la pertinence de ce tissu pour la confection d’un costume. Auriez vous des retours sur la tenue de cette laine à travers le temps ?
Avec mes remerciements,
Christophe
Bonsoir. Je ne sais que dire. Il parait que c’est le fin du fin. Mais je n’ai jamais eu de retour. C’est surtout une affaire marketing. Escorial est une marque déposée d’une race de mouton. Comme la race Gostwick chez Holland & Sherry. A la limite, si vous voulez vraiment vous faire plaisir, sélectionnez un 100% cachemire à costume. C’est infiniment rare mais sublime !
Bonjour, merci pour votre commentaire. Après réflexion et notamment avoir lu votre article « la beauté et la fragilité », je pense que je vais m’orienter vers un tissu moins luxueux. J’ai sous la main des échantillons de Scabal collection « The Royal » merino super 100’s. Ca n’a pas la douceur de l’Escorial ou de super 150’s mais le touché reste très agréable, surtout le tissu ne se froisse pas après l’avoir serré dans la main. Pour un costume destiné à être porté régulièrement dans mon activité professionnelle, c’est sans doute préférable. Peut-être un super 120’s ou 130’s, dans un poids moyen (280gr), avec un tissage twill qui froissera moins, pourrait-être un meilleur compromis si un tel tissu apporte en fluidité ou en « beauté visuel ». A voir.
Bonjour,
Et que faites-vous de la laine des moutons de la race Est à laine mérinos ? que l’on trouve principalement en Lorraine et en Alsace, de très bonne qualité.
La filière était moribonde et effectivement, la laine était envoyée en Chine, vendue à perte, 0.60 € le kilo et revenant en France en article textile. Elle est en train d’essayer de renaître, grâce à quelques passionnés.
cordialement
MN
On ne peut pas tout connaitre 🙂