Continuons sur les lancées précédentes pour étudier comment rester chic et se faire plaisir lorsque la cravate, voire le costume également, n’est plus en odeur de sainteté dans les couloirs du bureau. C’est ma philosophie, il faut toujours essayer de chercher un biais positif dans chaque situation. Pour la rendre vivable et en retirer un petit quelque chose, plaisir si infime soit-il.
Et je le pense, il est tout à fait possible de trouver un pré-carré chic et à soi, sans costume-cravate.
Je ne vais pas évoquer la veste seule, qui représente bien sûr un territoire d’expérimentation immense. Veste à carreaux, veste unie, veste simple, veste avant-gardiste, tout est possible suivant le niveau d’acceptation dans votre travail. J’avais fait un article en 2017 sur le plaisir de la veste sport, et quels étaient les tissus disponibles. Le choix est vaste. Toutefois, j’ai tendance à le penser, si le costume n’est pas utile, j’ai bien peur que la veste ne le soit pas plus en fait.
L’hiver, vous pouvez alors vous rabattre sur de beaux manteaux. Pourquoi se contenter d’un seul modèle marine? Au contraire, si vous êtes soulagé de la contrainte budgétaire du costume, faîtes vous plaisir sur le reste de la penderie. Et les beaux manteaux sont légions et variés ces temps-ci. Ils peuvent être droit ou croisé. Marine ou poil de chameau. Pourquoi pas de larges pieds-de-poule gris? Le polo-coat avec sa forme typée et le trench sont diamétralement opposés en style, ils peuvent donc dans une garde-robe vous apporter une grande mixité d’usages et d’occasions. Certains peuvent être très longs, d’autres trois-quarts. Vous voyez, si vous n’avez pas recours à la veste, vous pouvez vous amuser avec des manteaux, que vous pouvez faire ajuster de manière à les porter à même un pull, sans aisance importante.
Dans la continuité, il existe une énorme variété de pièces chaudes que l’on ne peut appeler manteau car ils sont courts, comme le blouson de cuir et autres fields-jacket pléthorique dans la garde robe preppy américaine, à la Steve McQuenn. Il y a aussi Barbour et ses copies. Ce sont des pièces avec un panache moindre par rapport à un grand manteau tailleur, mais elles complètent ces derniers et vous donnent de la souplesse au quotidien, suivant le temps et l’humeur.
Premier point donc, les pardessus et dérivés. Voyez ces exemples variés, il est possible de tous les avoir !
Sans veste, et avant d’attaquer la chemise, pensons ensuite aux pulls. La maille représente un terrain infini et pour les industriels du textile un eldorado. Peu chère à fabriquer, sans beaucoup de main d’œuvre, le tricotage leur plait. Côté consommateur, c’est l’occasion de s’amuser avec de la couleur. J’ai tendance à penser que l’impératif de la garde robe est un bon pull, en mérinos, en laine d’agneau voire en cachemire s’il est très bon, bleu marine comme base universelle. Il est ensuite possible de démultiplier les possibles en apportant un peu d’ocre, du prune, du bordeaux, du vert sapin etc… Soyez inventif et laissez-vous aller. N’achetez pas en revanche des camelotes en coton tout fin. Pour la maille comme pour le reste, il est préférentiel d’investir dans de la bonne qualité, bien taillée. Cela vous donnera une plus grande satisfaction sur le long terme. Inutile d’avoir 10 pulls médiocres, autant en avoir 4 de top niveau.
Ensuite, au delà de la couleur, il y a la forme. Les pulls se présentent de multiples manières. Il y a les cols ronds et les cols V dont on nous apprend à longueur de magazine féminin quelle le plus tendance. Mais il y a aussi les exquis cols roulés, qui eux aussi vont et viennent au rythme des marées. Et puis encore, les cardigans, avec ou sans manche. Vous voyez, quelle panoplie possible.
Je pense aussi à deux trouvailles de l’ère contemporaine que j’apprécie, le col zippé et la sur-chemise genre polo manche-longue. Je possède le premier en rouge, en grosse côte de coton de chez Gant depuis plus de 10ans et il n’a pas bougé. Très pratique et distingué le week-end. Et j’avais trouvé également un polo manche longue type sur-chemise en cachemire bleu ciel en Italie qui fait aussi merveille, ces deux modèles d’ailleurs tolérant assez bien une cravate ou un papillon du fait de leur ouverture prononcée à l’encolure.
Deuxième point très vaste vous le voyez donc, qui laisse de quoi passer d’un grand faiseur à un autre, qui laisse de quoi s’amuser par de vastes couleurs et formes. J’ai ici sélectionné quelques formes permettant d’exprimer votre personnalité et de chaque jour renouveler votre élégance :
Ensuite, il y a la chemise. Je l’avais déjà dit cet été. Que de possibilité sans veste! Faîtes vous plaisir et ne vous contentez pas de simples unis. Si vous ne voulez pas être en t-shirt au bureau et que vous n’avez pas d’utilité d’une veste, foncez sur la chemise, le vêtement de dessus du XXIème siècle me semble-t-il.
En mesure ou en prêt-à-porter, l’offre est pléthorique. Vous pouvez varier les cols et les types de poignets : col italien, col rond, col boutonné, poignet avec ou sans boutons de manchettes. Et au delà, les matières : certains seront plus estivales, d’autres par l’épaisseur et l’aspect plus hivernales. Quand aux couleurs, diantre que c’est drôle : rayé bleu ciel, largement rayé rouge, multiples rayures grises d’intensité variables, chevrons qui irisent, denim, velours fin, flanelle de coton et oxford moelleux, vichy vert ou jaune citron.
Avoisiner les 30 chemises dans la penderie devient possible et il ne faut pas hésiter. C’est un amusement. Et vous pouvez naviguer entre les soldes chez Ralph Lauren et une très belle façon chez Howard’s ou Courtot à Paris, par exemple. Laissez vous là encore porter par la couleur. Les autres portent des t-shirt avec des gros logos. Certains même vont chez Desigual ou SuperDry. Donc vous ne serait pas en reste avec vos rayures de confiseurs!
Troisième ensemble très vaste donc. PS : une chemise bien repassée peut déjà suffire dans un couloir où la médiocrité règne, à en mettre plein la vue! Petite avalanche ci-dessous, qui pourtant n’est qu’une infime fraction des possibles!
Quatrième point, mon plaisir par ailleurs, le pantalon. Ah, j’ai tant écrit sur le sujet. Franchement, tous ces jeans et ces chinos vendus à longueur d’étalages et de boutiques en ligne, vantant toute le super basic ou l’essentiel ultime, et qui finalement toutes vendent le même produit, vaguement avachi, sans forme et perdant la couleur en deux coups de cuillère à pot.
Au delà de la simplicité du chino ou de jean, un bon moyen de se différencier dans les couloirs, même en baskets à la rigueur, c’est de porter un beau pantalon, en laine ou en mélange précieux. Et s’il n’y a plus de veste, de pouvoir oser un carreaux ou un prince-de-galles en bas, sans problématique de raccord compliqué.
Le registre des pantalons est très vaste et très saisonnier, laine froide contre flanelle, lin contre tweed. Régalez-vous et composez là aussi une penderie importante. D’autant que le pantalon s’use, alors autant en avoir un certain nombre, ils s’useront d’autant moins.
Et les couleurs là aussi ne sont pas en reste. Du velours écarlate au cavalry twill beige, vous pouvez moduler les effets et les combinaisons.
Enfin, deux grands points restent encore à étudier : les chaussettes et les souliers. Pas de costume-cravate? Qu’à cela ne tienne, mettez-en plein la vue avec des chaussettes bicolores et irisées, avec des richelieus glacés ou des mocassins très fins. Les maisons, vous le savez bien, sont nombreuses, de Bresciani à Mazarin, de Malfroid à Laszlo Vass. Et il est même possible d’apprécier les baskets patinés de chez Loding ou Weston.
Mais attention, il faut aller pianissimo tout de même. Le tapage est vite arrivé lorsque l’on est plein d’entrain. Il faut veiller à l’ambiance du bureau et s’y fondre avec délicatesse. Il faut faire contre mauvaise fortune bon cœur. Il faut se faire doucement remarquer et non mal-voir. Les français sont assez jaloux ou envieux. Truman Capote en son temps l’avait remarqué. Faut-il parfois faire plus envie que pitié? Question.
Toutefois, savoir refuser le jean t-shirt est impératif. C’est une marque d’amour propre. L’élégance est un plaisir à partager, il faut toujours s’en rappeler. Elle n’est pas là d’ailleurs pour écraser celui qui n’en a pas. Mais lui montrer comme disait Saint Laurent, comment « vivre en beauté« !
Bonne semaine, Julien Scavini














